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"Survivre" : une conversation avec Hélène Gaudy

  • Photo du rédacteur: Maison des écrivains et de la littérature
    Maison des écrivains et de la littérature
  • il y a 2 heures
  • 2 min de lecture




La Maison des écrivains risque en ce mois de juin de fermer. Loin d'être un cas isolé, la Maison des écrivains est la victime d'une politique budgétaire du ministère de la Culture qui, avec Rachida Dati, va contre sa mission de service public. En effet, au lieu de consacrer les fonds publics à l'ensemble de la population, on assiste progressivement à une privatisation passive des moyens de l'Etat pour venir alimenter des fonds privés. Dernier exemple de cette politique de pickpocket, l'opération de Rachida Dati à destination des campings. Jouant d'un populisme sans fard et d'une démagogie qui est censée pétrifier les autrices et les auteurs, la ministre choisit entre rappel à l'ordre pour 400 000 euros non déclarés de bijoux et préparation de sa défense dans l'affaire de corruption passive Renault de consacrer les fonds publics aux divertissements dans les campings. Or les campings sont des entreprises privées, des entreprises qui vont bénéficier de spectacles gratuits tout en faisant payer les campeurs.

Cet argent, les élèves et les enseignants de l'éducation artistique ne le verront pas. Ils n'ont pas tous les moyens d'avoir une tente Quechua et de la planter pour voir des spectacles subventionnés par le ministère de la Culture. En revanche, avant la privatisation passive de Dati, l'éducation artistique existait. Les mesures d'économie qui obligent la MEL à fermer sont le premier signal de la fin programmée de cet enseignement : la MEL est, rappelons-le, le premier employeur en France des écrivains. Ces derniers se rendaient gratuitement dans les classes, dans le cadre de programme et pouvaient travailler avec les élèves : 30 000 élèves bénéficient tous les ans de la MEL, 10 000 étudiants en Europe. Et qui, pour certains, ne partent pas en vacances. Car n'en déplaise à Rachida Dati, quand on sort du 7e arrondissement, le camping est un luxe, les campeurs des privilégiés, et finalement trop peu de Françaises et de Francais partent en vacances. Parfois la démagogie se retourne contre la démagogue.

Enfin, ne nous trompons pas, cette violence institutionnelle qui frappe la MEL participe d'une politique plus globale : celle qui vient favoriser le privé, qui marque un recul concerté des politiques publiques de culture pour laisser place à des groupes privés, travaillés par Stérin et Bolloré pour les plus visibles d'entre eux, par une politique d'hégémonie culturelle visant à restaurer, par leur catholocisme de Croisés, des idées au mieux conservatrices, au pire fascisantes.

En France, la bataille est d'abord et toujours culturelle : le débat public a cette particularité de placer le livre en son centre, de le définir, aux côtés des lois juridiques et religieuses, comme la loi morale qui définit la conduite. Annuler la culture et l'éducation artistiques comme le fait Rachida Dati ne se fait qu'au profit du privé catholique ou des campeurs qui auront toujours de quoi payer pour la culture. Et de quoi offrir des foulards à Rachida Dati.


Johan Faerber



En défense de la MEL, cet entretien de 2021 dans le cadre des Enjeux contemporains dont le nom résonne encore plus fortement aujourd'hui : Survivre.


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