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La revue TINA : "Pas de compromis avec le capitalisme, pas d’ajustement à la logique marchande. Notre slogan : Il faut tout reprendre !"

  • Photo du rédacteur: Johan Faerber
    Johan Faerber
  • il y a 52 minutes
  • 5 min de lecture

 Réarmez-vous
Réarmez-vous



TINA est une revue d’idées, d’imaginaires et de critiques consacrée aux auteur.e.s et artistes qui prospectent, explorent, s’aventurent loin de la facilité commerciale et des répétitions. La revue TINA tente une expérience littéraire, politique, artistique, critique, bricologique, évolutive, libre, en format numérique gratuit (TINA online), une fois par an en format papier payant (TINA papier), et chaque mois avec des évènements ou des actions. https://editionsjou.net/tina/ Vous ne connaissez pas encore TINA, c'est un tort que Collateral vous propose de réparer immédiatement en interrogeant Eric Arlix, son maître d'oeuvre.



Comment est née votre revue ? Existe-t-il un collectif d’écrivains à l’origine de votre désir de revue ou s’agit-il d’un désir bien plus individuel ? S’agissait-il pour vous de souscrire à un imaginaire littéraire selon lequel être écrivain, comme pour Olivier dans Les Faux-Monnayeurs de Gide, consiste d’abord à écrire dans une revue ?  


La revue est née de discussions entre écrivains et artistes d'accord sur la contre-formule TINA, acronyme d’une formule de Margaret Thatcher (There Is No Alternative), mot d’ordre du néolibéralisme dans les années 80. TINA, la revue, prend aujourd’hui la formule à revers pour dire qu’il n’y a pas d’arrangement possible (There Is No Adjustment). Pas de compromis avec le capitalisme, pas d’ajustement à la logique marchande, au luxe et au marché de la culture. Notre slogan : Il faut tout reprendre ! TINA avance à contre-courant dans un monde où les expériences artistiques n'intéressent plus grand monde. De ce point de vue, l’imaginaire des faux-monnayeurs serait plutôt pour nous celui du sabotage de la valeur, plus que le fantasme d'une carrière. Pour y parvenir la revue fonctionne comme un tout, selon trois protocoles complémentaires : un support internet (en ligne, gratuit), un support papier (une fois par an en librairie, le n°1 à paraître dans quelques jours) accompagné par des évènements, des actions mensuelles (marche, salon, rencontres et actions), qui font de TINA un lieu vivant, collectif et évolutif.



Quelle vision de la littérature entendez-vous défendre dans vos différents numéros ? Procédez-vous selon une profession de foi établie en amont du premier numéro ?  


TINA est avant tout une revue d’idées et d’imaginaires, ce n'est pas à proprement parler une revue littéraire, même si la fiction est un moyen souvent utilisé. La littérature ce n'est pas uniquement la fiction ou le roman, la poésie. C'est le souci de la langue, d'une forme propre, que l'on soit essayiste, écrivain.e ou engagé dans un projet artistique. Il y a toujours eu des mémoires et des essais, ou des livres d'histoire ou d'anthropologie et bien sûr de philosophie qui sont de la littérature. La revue papier se présente plutôt comme un ouvrage collectif, sans rubriques, construit autour d’un thème unique à chaque numéro, avec des interventions inédites. Les auteur.e.s, artistes, essayistes que nous sollicitons pour la revue (papier ou en ligne) ont tous et toutes en commun de ne pas avoir sombré dans la marchandisation des arts et des idées, de ne pas être des produits en quête permanente d’audience, ils et elles prennent le risque de l’inédit et du tâtonnement et remettent en cause leurs travaux, leurs diffusions, leurs partages dans un contexte contemporain où les aspects commerciaux prennent trop souvent le dessus. Notre conviction : il faut tout reprendre, tout repenser.Pour citer quelques noms sur les 67 participants à TINA pour l'instant : Geneviève Pruvost, Perrine le Querrec, Christian Salmon, Claude Closky, Pavel Hak, Hortense Gauthier, Jean-Charles Massera, Pauline Lecerf, Antoine Dufeu, Charles Pennequin, Francine Flandrin, Jean-Marc Flahaut, Ian Soliane, Adrien Blouët, Grégory Chatonsky… Tous et toutes explorent d’autres façons d’écrire et de penser.Sinon, pas de profession de foi à proprement parler, de discours monolithique, mais deux articles de TINA online servent également d'appui pour mener notre réflexion :150 mots-clés (https://editionsjou.net/2025/08/23/150-les-mots-cles-tina/) Bibliothèque de 505 livres (https://editionsjou.net/2025/06/24/113-la-biblio-ultra-contemporaine-de-tina/)




Comment décidez-vous de la composition d’un numéro ? Suivez-vous l’actualité littéraire ou s’agit-il au contraire pour vous de défendre une littérature détachée des contingences du marché éditorial ? Pouvez-vous nous présenter un numéro qui vous tient particulièrement à cœur ?


Un thème s’impose pour l’année, et autour de lui, des propositions surgissent. Pas de comité, pas de direction éditoriale au sens traditionnel du terme, mais un bureau évolutif qui élabore le sommaire de la revue papier, lance les invitations et écrit pour la revue en ligne. Nous faisons confiance aux rencontres, aux imprévus, aux accidents. Prospection et tâtonnement, déceptions et surprises, c'est imprévisible. L'improbable nous tient à cœur. Et comme l'époque est improbable, disons que cela tombe plutôt bien.TINA n'en peut plus de romans préfabriqués à partir d'un fait historique, d'un fait de société, d'une expérience intime ou des stylistes qui écrivent sur des sujets qu'ils ne maîtrisent pas en pensant que la langue fait tout, sans expérience du monde. Écrire un énième roman parce qu'on a retrouvé au grenier une photo d'arrière-grand-papa en uniforme de poilu ça va un moment. TINA refuse la production calibrée pour le marché.Notre premier numéro papier, (in)visibilité(s) (en librairie le 15 octobre 2025), rassemble 21 auteur.e.s. Il explore les manières d’être vu ou de se rendre invisible. La tension entre visible et invisible ouvrant un espace de création, de critique et d’action : à travers des codes, des processus, des combats, des arpentages, des fictions.




Edito
Edito



À la création de sa revue Trafic, Serge Daney affirmait que tout revue consiste à faire revenir, à faire revoir ce qu’on n’aurait peut-être pas aperçu sans elle. Que cherchez-vous à faire revenir dans votre revue qui aurait peut-être été mal vu sans elle ?  


Nous dirions faire advenir plutôt que faire revenir. Il s'agit de prospection plus que de critique. Nous espérons surtout anticiper et accompagner l'émergence de nouvelles formes et de nouveaux rapports au monde, et nous sommes peu soucieux de commenter les formes déjà vues, bien vues, mal vues, pas vues.  Par contre c'est vrai, on peut donner à voir, décrire, interroger le réel qui est déjà là devant nous, mais qu'en général on oublie de percevoir, d'appréhender (comme la fameuse lettre d'Edgar Poe, même si l'image est un peu galvaudée). C'est l'approche choisie par certains des auteurs pour (in)visibilité(s), parler de ce qui se montre souvent pour mieux se cacher, chercher ce qui se cache derrière ce qui se montre, parler du pouvoir anesthésiant de l'omniprésence.




Est-ce qu’enfin créer et animer une revue aujourd’hui, dans un contexte économique complexe pour la diffusion, n’est-ce pas finalement affirmer un geste politique ? Une manière de résistance ? 


Tout ce qui s'oppose au spectacle de l'art, à son hyper marchandisation, est de fait politique. Mais cela ne suffit pas, quand TINA affirme "Il faut tout reprendre" cela veut dire qu'il faut tout réinventer, on le voit bien tous les milieux artistiques sont à bout de souffle, déprimés, en lutte pour leurs survies (là on ne parle pas des artistes-produits). Les librairies peinent à défendre certains livres, les musées et galeries ne parviennent plus à rendre compte de certains travaux artistiques, la presse n'est plus à même de relayer certaines expériences. C’est une réorganisation totale qui est en cours.C'est le constat que font Inès Sol Salas et Hélène Ling dans leur essai post-Covid Le Fétiche et la plume. Si par exemple un roman, une nouvelle ou même une enquête sociologique doivent être conçus pour être déclinables au format série TV (ou autre), vu que les grands groupes d'éditions vont rejoindre les géants du divertissement intégré, eh bien on a un vrai problème, là. Et on le voyait venir, bien sûr.



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